L’empailleur auvergnat

Pour cette 21ème consigne : Vous trouverez le commentaire en fin de lecture !

L’empailleur auvergnat

La mort de son épouse avait rendu Francis taciturne. Il ne fréquentait plus de lieux publics et avait développé une passion pour la chasse. Une activité pratiquée en solitaire. C’était son moment, il pouvait assouvir son droit de prédateur perfectionniste, loin des critiques des collègues du bureau, du harcèlement de son patron et de la maison remplie de souvenirs douloureux.

Hier, comme à chaque fois, l’adrénaline l’avait gagné. Après avoir garé son pickup à l’orée du bois, il avait parcouru quelques centaines de mètres à pied avant de se poster derrière un buisson. Francis avait aperçu le gibier, suivi ses déplacements, l’excitation était à son paroxysme. Cultivant un art de la méthode, il devenait expert dans ce domaine.

Le même rituel était toujours pratiqué quand il revenait chez lui. Il garait sa voiture dans l’allée, actionnait la porte automatique et reculait dans le garage. Il sortait ensuite sa prise du jour du coffre, la couchait sur son établi et procédait à l’exsanguination et au découpage. C’était un travail méticuleux qu’il exerçait à la lueur d’un néon blanc avec une expertise chirurgicale. Il gardait toujours la tête pour l’empailler. Son épouse n’aurait pas supporté la vue de ces dépouilles, alors il avait un local au fond du jardin pour y stocker tous ses trophées.

Au début, les traques se faisaient à distance, juste muni de sa carabine avec silencieux. Mais il avait appris à patienter. Attendant parfois plusieurs heures avant de voir déambuler devant ses yeux l’objet de son attention. L’œil dans le viseur, le doigt sur la gâchette, la respiration était retenue et le coup partait. Francis visait toujours le cœur afin de ne pas abîmer la face de son précieux butin.

Maintenant, il était passé au couteau pour se rapprocher de sa proie. Provoquer la frayeur,  lui laisser une chance de s’échapper. Et finalement la douleur, déformant le corps à chaque coup de lame, Francis trouvait ça jouissif. Il faisait preuve d’une grande ténacité et de peu de remords. Se sentant vivant quand il donnait la mort.

Lorsqu’il se préparait son repas du soir, il ne pouvait s’empêcher de jeter un regard vers son épouse. Elle était dans le living, à le fixer avec son regard vitreux, figée au milieu des photos de famille et des cadres poussiéreux. Comme si elle continuait à le juger. Vinciane lui aurait certainement reproché son activité violente. Ecraser une fourmi était déjà de trop.Elle n’aurait pas compris son engouement pour la cruauté. D’ailleurs elle ne le comprenait pas souvent. Leurs dernières conversations terminaient toujours par des reproches sur son penchant pour l’alcool.

Il avait le sentiment que plus personne ne le soutenait. Même son ami Jacques, qui avait essayé de le remotiver durant des semaines avait fini par l’abandonner. Pourtant il devait saisir son désarroi, il avait également pleuré une fille dernièrement. Si quelqu’un pouvait comprendre ce que représente la perte d’un être cher, c’était bien lui. Francis, refermé sur lui-même et sans amis, s’était alors jeté à corps perdu dans sa passion.

Hier soir, en revenant de la forêt, le chasseur aperçut un barrage de police. Pris de panique en jetant un rapide coup d’œil sur le niveau de la bouteille de whisky couchée sur le siège passager, il décida de le forcer. Arrivé à hauteur des agents, Francis sentit son véhicule se dérober et ne put l’empêcher de plonger dans le fossé. Il releva la tête du volant, le coffre de la voiture était ouvert, les policiers horrifiés braquaient leur arme vers lui et lui demandaient de sortir les mains en évidence.

La dépêche du lendemain titrait : découverte macabre chez l’empailleur auvergnat. C’est par hasard que la police a mis fin à une enquête qui pataugeait depuis des mois. Francis Dubois, quarante-deux ans est l’auteur des rapts de ces dernières semaines dans la région de la forêt de Tronçais. Les corps des vingt-six victimes portées disparues ont été retrouvés dans des frigos installés dans un abri au fond du jardin du quarantenaire. Leurs visages empaillés ornaient les murs. Celui de son épouse a également été découvert trônant au milieu du living de la maison du meurtrier. Le présumé psychopathe sera entendu dans la journée.

Donc, l’axe de cette consigne était d’écrire une nouvelle avec effet de chute, à vous de me dire si la mission est réussie !

4 réflexions sur “L’empailleur auvergnat”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Content is protected !!
Retour en haut