Père sur la brèche

Pour cette 3ème consigne, il fallait rédiger une nouvelle « instant ». Toute l’intrigue doit se dérouler autour d’un acte dans un temps court et intense. Bonne lecture !

Père sur la brèche

François entendit un violent claquement de portière. Ce bruit incongru le sortit de sa lecture. Il releva brusquement la tête et regarda par la fenêtre. Son sang se glaça. Ses membres se figèrent. La fenêtre de son bureau donnait sur l’allée du garage. Le portail était entrouvert. La veste de sa fille, qui jouait au basket un instant plus tôt, était abandonnée sur le sol. Il entendit alors un moteur vrombir.

– Emma ?!

Il bondit du fauteuil, lança le journal à travers la pièce, saisit ses clés dans le hall et se précipita vers le portail. Une camionnette rouge s’éloignait dans la rue principale en direction du boulevard. Il s’empressa d’ouvrir le volet du garage. Mélanie, son épouse, arriva paniquée, surprise par l’attitude inhabituelle de son mari. Elle l’interpella alors qu’il s’engouffrait dans la voiture.

– Chéri, que se passe-t-il ? Où cours-tu comme ça ?

– C’est Emma, elle vient de se faire enlever !

– Que, quo… quoi ?

– Appelle la police, je fonce rattraper ce salaud.

– Mais… François… Mélanie n’eut pas le temps de terminer sa phrase. Il faisait déjà marche arrière dans l’allée.

François mit le pied au plancher pour combler les quelques centaines de mètres qui le séparaient de la camionnette. Sa mâchoire était serrée, sa gorge nouée. Il n’hésita pas à brûler le feu rouge pour débouler à toute vitesse sur le boulevard. Bientôt, il se trouva à distance correcte pour lire la plaque du véhicule. Il chercha alors son téléphone dans sa poche pour prévenir les secours. Il vérifia dans l’habitacle et tâta le siège passager. Il l’avait oublié. Lorsqu’il regarda à nouveau devant lui, la camionnette avait ralenti et s’apprêtait à tourner dans la perpendiculaire. Il eut juste le temps de braquer le volant pour éviter la collision. Il fit demi-tour dès que la circulation le permit et s’engagea dans la rue.

Il avait les doigts crispés sur le volant, des crampes dans les bras, des fourmillements dans les jambes. La clarté diminuait peu à peu et quelques gouttes commençaient à apparaître sur le pare-brise. François alluma ses feux de route car il ne voyait plus la camionnette. Une berline noire, aux vitres fumées, le klaxonna en le croisant à vive allure. Soudain il vit que le van était arrêté dans un sentier jouxtant la déchetterie du quartier. Sans réfléchir, il se dirigea vers le véhicule et s’arrêta à quelques centimètres de celui-ci.

Il sortit et se précipita vers la portière du conducteur. Il l’ouvrit et tendit sont poing rageur, mais constata que le véhicule était vide.  Il entendit du bruit derrière lui. Son coeur battait la chamade. Il se retourna et vit une silhouette penchée, en train de gesticuler, dans le fossé. François saisit une barre métallique, dans les détritus qui bordaient la route, et assomma l’homme d’un coup à la tête, qui s’effondra. Il dégagea le corps pour constater ce qu’il recouvrait : un chien blessé gisant au sol.

Le temps de reprendre ses esprits, il remonta la butte, fit coulisser la portière arrière de la camionnette pour y découvrir un tas de vieux métaux et une couverture sur le plancher. François était perdu. Où était sa fille ? Son cerveau était embué. Il repensa à la berline noire. Dans ce genre d’opération, tout va très vite, tout est organisé. Il le savait. Il ne fallait pas perdre de temps.

De retour dans la voiture, François sillonna toutes les rues, les boulevards, les avenues. Aucune trace de la berline noire. A l’évidence, il ne pourrait plus jamais serrer sa princesse dans les bras. Terminées les heures à l’observer jouer au basket. Il revoyait son visage d’ange, illuminé par un sourire reconnaissant lors de la fixation de son panier. Brisés, les rêves, les espoirs entretenus par les coachs. Les larmes coulaient sur le visage de François. Il ne pouvait s’empêcher de trembler, de gémir, il était anéanti.

Emma était de loin la plus grande réussite de sa vie. Un sentiment nouveau s’était créé chez François lors de sa naissance. Fierté, protection, amour inconditionnel, le tout en un. Et on la lui arrachait. Pour quelle raison ? Pourquoi elle ? Une rançon ? Il s’accrocha à cette idée, s’il payait, il pourrait la revoir. Il fallait faire confiance aux autorités. Il avait fait ce qu’il pouvait. Il hésita à se rendre au commissariat. Mais il préféra rejoindre son épouse pour affronter la suite de cette épreuve avec elle.

Alors qu’il arrivait près de la maison, il appréhenda de soutenir le regard de Mélanie. Comment allait-il lui annoncer que son opération de sauvetage avait échoué. Il gara la voiture, éteignit le moteur et se dirigea vers la porte d’entrée. Il déposa machinalement ses clés dans le hall et continua vers son bureau pour y récupérer son téléphone. Sa femme n’était pas là. Avait-elle dû accompagner la police ?

Lorsque François saisit son portable, il constata les sept appels en absence et le message que Mélanie lui avait laissé : « Mon amour, plus de peur que de mal. Emma avait envoyé la balle dans le jardin de la voisine et est allée la récupérer. Nous sommes d’ailleurs chez elle, nous t’attendons. J’ai prévenu la police pour qu’elle te recherche ou te prévienne. J’espère que tu ne fais rien d’imprudent… Je m’inquiète et je t’aime. »

3 réflexions sur “Père sur la brèche”

  1. Oui l’acte de départ est bref et rapide….je me suis étonnée de ne pas entendre le père appeler sa fille au moins une fois avant de partir!
    C’est bien mené, on a envie de connaître le dénouement même si l’on se doute de voir Emma réapparaître !

  2. Une intrigue de départ osée puisque c’est certainement une grosse inquiétude pour les parents dans notre société à travers le monde.
    Tu aurais pu faire moins d’actions et plus de chamboulement instantané émotionnel. En effet la fin est un peu prévisible.
    Par contre c’est très agréable à lire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Content is protected !!
Retour en haut